V I E D E L’A C E LETTRE À CLAUDE HAGÈGE : Et puis je voulais aussi vous dire le plaisir, la joie d’avoir découvert votre médication pour favoriser “la construction d’un esprit libre et capable d’opposer une résistance victorieuse aux assauts répétés de la pensée unique. Cette activité a un nom simple : la lecture”. Je vous laisse la parole en souhaitant que vous nous traduisiez, en américain : “Il est interdit de marcher sur la pelouse”1 ! Je n’ai malheureusement rien pu vous dire de tout cela car les sollicitations dont vous faisiez l’objet, le mode de locomotion que vous utilisez ont reporté d’une heure le début de votre conférence… Mais vous m’avez avoué, plus tard, que vous n’y connaissiez rien aux systèmes de droit… Tant pis ! Cela étant et avec le talent provocateur qui est le vôtre et dont nous avons bien pris conscience, vous nous avez appris ou rappelé, selon chacun : • Que la pensée unique est activement promue dans des cénacles animés par des favoris des médias, complices de l’action inspirée par l’atlantisme et son “bastion avancé” : Bruxelles et l’Union européenne et vous ajoutez que “le consentement docile de l’Europe soumise à la pression culturelle est d’autant moins justifié, et la dépendance européenne d’autant plus surprenante, que l’Europe est elle-même une source essentielle de la culture américaine” 2, • Que l’Ecole tente d’angliciser l’enseignement et qu’“en voulant généraliser l’enseignement de l’anglais dès les premières classes de l’école primaire, on ne se soucie pas de savoir si le français lui-même est suffisamment connu des écoliers français” 3, Chantal ROISNÉ-MÉGARD, Docteur en droit, Avocat honoraire Chapet, 18 juin 2012 her monsieur, Voici ce que je pensais vous dire en vous accueillant, le 13 mars 2012, à la Bibliothèque de l’Ordre des avocats du barreau de Paris : « Claude HAGÈGE, le titre de votre ouvrage “Contre la pensée unique” est un appel à sa lecture pour tous ceux qui ont un peu l’âme rebelle ! Cela me convient bien ! Je ne vous ai pas caché, en vous proposant d’être parmi nous ce soir, que je faisais un parallèle entre votre appel à la défense de la langue française et notre souhait, en tous les cas le souhait de certains d’entre nous ici, de défendre notre droit civil, la “civil law”, face à la volonté affirmée par l’Amérique d’imposer la “common law” d’autant que la lecture de votre ouvrage nous permet de constater une réelle superposition entre les pays qui se réfèrent encore (ou de nouveau, grâce à la francophonie) à la langue française et les pays qui appliquent des droits de tradition civiliste. Pour nous, juristes, il s’agit de la bataille d’un droit écrit, codifié, conceptuel, face à un système juridique pragmatique, basé essentiellement sur la jurisprudence, c'est-àdire le recensement des “précédents”. J’ai l’intime conviction que votre plaidoyer pour la diversité des langues et des pensées va insuffler de l’énergie aux défenseurs de la “civil law”, ici présents. C De gauche à droite : William FEUGÈRE, Claude HAGÈGE et Daniel TRICOT, Président AFDD 1. « Selon D.I. Slobin, il serait inconcevable de trouver au Jardin zoologique de Paris un écriteau comparable à celui qui est apposé à l’entrée du Parc des animaux sauvages du zoo de San Diego (Californie), et sur lequel on peut lire : « Do not tread, mosey, hop, trample, step, plot, tiptoe, trot, traipse, meander, creep, prance, amble, job, trudge, march, stomp, toddle, jump, stumble, trod, spring or walk on the plants » (p. 158 de « Contre la pensée unique »). 2. Opus cité, p. 106. 3. Ibidem, p. 104. Pour voir le film de la Conférence de Claude Hagège, à la Bibliothèque du Palais à Paris, rendez-vous sur le site de l’ACE : www.avocats-conseils.org 8 • LA REVUE DE L’AVOCAT CONSEIL D’ENTREPRISES • SEPTEMBRE 2012 • N° 121